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Monseigneur Emmanuel KATALIKO

Monseigneur Emmanuel KATALIKO

Reconnu pour son humilité et la simplicité de son style de vie, Mgr Emmanuel Kataliko a révélé sa vraie grandeur à sa mort. En effet, nombreux son ceux qui ont découvert qui il était vraiment de par les témoignages et les messages de condoléances à l’occasion de ses funérailles. A travers les quelques lignes qui vont suivre, nous nous proposons de lui rendre hommage en cette année jubilaire de sa naissance au ciel. Un regard attentif sur son épiscopat trouvera en lui un évêque dont l’engagement social était indissociable du ministère pastoral. Ce qui lui vaut d’être considéré comme la voix des sans voix. Il faut le dire, de Butembo-Beni à Bukavu, un souci particulier pour les pauvres et les petits a non seulement inspiré mais aussi orienté toute son action pastorale.

A la suite du Christ, à l’égard du peuple de Dieu confié à son soin pastoral, il a été ce Bon Pasteur qui a porté sa brebis sur ses épaules et qui en a constamment senti l’odeur. Il a partagé les peines et les joies de son peuple. Il n’a ménagé aucun effort le  bien-être de son peuple.

Exerçant son ministère dans un contexte où la valeur et la place de l’homme étaient remises en cause au regard des exactions dont l’homme était victime, Mgr Emmanuel Kataliko s’est engagé dans une lutte acharnée contre tout ce qui avilit l’image de Dieu en l’homme en foulant au pieds ses droits amenuisant ainsi sa dignité.  Voilà qui , par exemple, justifie son ton purement prophétique dans la plupart de ses messages.  Nous pouvons citer ici celui de Noël 1999, qui d’ailleurs peut-être considérer comme un testament.

En fait, c’est en un langage suffisamment limpide qu’il rappelait ce qui suit :  » Aujourd’hui comme par le passé, nous sommes appelés à recouvrer notre dignité d’hommes libres. Notre vie quotidienne est loin de la joie et de la liberté. Nous sommes écrasés par une oppression de domination. (…) Même notre personne humaine n’échappe pas à cette exploitation oppressive. » C’est dans un contexte aussi déshumanisant que celui-ci que Mgr Emmanuel Kataliko se révélera comme un militant, un défenseur des opprimés, un pasteur défenseur des brebis contre les lions.  Autant qu’il pouvait, il a porté haut la voix de ceux dont les droits étaient foulés aux pieds; dynamique dans laquelle il voudrait voir tout l’épiscopat africain s’engager.

Son appel adressé aux membres du SCEAM lors des assises tenues à Rome en octobre 2000 est plus que clair, lorsqu’il souligné: » Nous devons parler, car le peuple souffre. Nous devons parler aux chefs d’État, il faut parler aux dirigeants. Nous devons adresser à l’Afrique un message de réconciliation et de paix » . Ce n’est donc pas hors propos qu’il soit appelé  » voix des sans voix ». Face à la souffrance de son peuple il n’a jamais été indifférent.

 En effet, durant toute sa vie il s’est approprié le message du Christ citant le prophète Isaïe ( cf. Is 61, 1-2) en ces termes :  » L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a consacré par l’onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé annoncer aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur »( Lc 4, 18).  Et à notre humble avis c’est au message de ce passage que le ministère épiscopal de Mgr Emmanuel Kataliko  voulait donner corps à tout prix.

 Au fait, défenseur infatigable des droits humains, Mgr Emmanuel Kataliko était animé d’un courage intrépide qui lui vaudra finalement la persécution. C’est ce que le Père Sitone Matthieu nous fait remarquer en soulignant qu’à « deux reprises il fut mis en prison pour avoir défendu des innocents et qu’à maintes occasions il faillit être incarcéré à cause des interventions incessantes auprès des autorités politiques et militaires pour la libération d’hommes et de femmes lesés dans leur droits « . (Cf. Matthieu Subao Sitone, Hommage à Mgr Emmanuel Kataliko, Archevêque de Bukavu ( 17 mai———–11octobre 2000, p.95).

Imitant le Christ, son Maître, Mgr Emmanuel Kataliko s’est engagé pour que tous aient la vie. Une vie qui respecte la valeur et la place de tout un chacun en tant qu’être humain créé à l’image et à la ressemblance divine. Déplorant le sort dégradant que l’on voulait imposer à son peuple Mgr Emmanuel Kataliko ne loupait aucune occasion pour dénoncer le mal ainsi que ses auteurs. Aucun de ses messages n’a été privé du ton prophétique attendu de tout pasteur lorsque son troupeau est menace.

 Et à ce niveau il sied de le remarquer, comme Jean-Baptiste, » il avait parlé si fort que tous les puissants ont voulu sa mort ». Nous le savons, les derniers jours de son épiscopat ont été un calvaire. Les épisodes de sa relégation à Butembo alors qu’il était déjà archevêque de Bukavu peuvent nous en dire long. En vaillant soldat, le 04/04/ 2000, il est mort arme à la main, fidèle à son engagement envers son peuple: Bon Pasteur qui n’a jamais abandonné son troupeau. Il lui a vraiment manifesté son amour en partageant ses peines et ses joies. 

De notre part, nous trouvons en lui un homme qui a vraiment compris qu’on ne vit pleinement que lorsqu’on vit, moins pour soi-même mais plus les autres. En tout, il s’est opposé à tout ce qui porte atteinte à la dignité humaine. Éveillant la conscience de son peuple il invitait à la résistance contre l’oppression sous toutes ses formes. D’où ce message : N’acceptez pas qu’on vous avale et si on vous avale ne supportez pas qu’on vous digère.  Alors que nous sommes embarqués, depuis plus de trois décennies,dans une guerre dont nous maîtrisons mal les contours, quelle interprétation ou mieux quelle appropriation avons-nous fait de cet appel prophétique ?

Par Monsieur l’Abbé Dimitri

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